Décryptage du mécanisme Post-ARENH de régulation du nucléaire

Analyse du mécanisme de régulation nucléaire dit « post-Arenh » tel que présenté lors de la conférence de presse du 15 novembre par Agnès Panier-Runacher, Bruno Le Maire et Luc Rémont.

Alors que le gouvernement prétendait avoir obtenu une grande victoire auprès de ses partenaires européens en permettant des contrats publics de long terme (CFD) sur le nucléaire existant, le mécanisme annoncé n’y recourt pas, lui préférant une taxation progressive qui ne sécurise ni les investissements dans le futur parc de production, ni la facture des consommateurs. Le prix moyen de 70 €/MWh sur toute la production nucléaire, prétendument garanti, n’est en fait qu’une estimation du prix de marché moyen jusqu’en 2041 ! Il suffirait d’y croire, alors que personne n’a été capable de prévoir ces prix par le passé !

Avec les prix de marché actuel, le prix de vente du nucléaire aux consommateurs se situerait entre 95 et 100 €/MWh (simulation en annexe), bien loin de son coût de production estimé à 60 €/MWh par la CRE. Et rien n’indique que cette rente ira au renouvellement du parc, ni même quelle part ira à EDF et quelle part continuera d’alimenter les fournisseurs dont tous les consommateurs dénoncent le caractère inutile et même nuisible.

Ce mécanisme risque d’être moins protecteur que l’ARENH pour les consommateurs, et pas davantage pour EDF (notamment puisque rien n’est prévu en cas d’effondrement des prix).

Cela fait un an que le Gouvernement tient en haleine les citoyens en prétendant se battre pied à pied sur un seul aspect de la réforme européenne du marché de l’électricité – les CFD sur le nucléaire-  passant sous silence les autres dangers de cette réforme : Tout cela pour finalement y renoncer ? Et pour proposer un système encore plus complexe, bien loin d’être totalement décrit malgré un an de prétendue négociation avec EDF ? Un système qui, par rapport à un CFD, augmente l’exposition d’EDF comme des usagers au risque de prix ?

EDF se targue d’avoir commencé à vendre à long terme, avec des contrats privés de type PPA, son nucléaire respectivement à 83 et à 77 €/MWh pour 2026 et 2027 … Mais à qui ? Pas particulièrement à des consommateurs français ! Les industriels allemands, par exemple, y ont également accès. On est donc bien loin des promesses gouvernementales de maîtriser les prix de l’électricité et de réserver aux consommateurs français le nucléaire à « bas » coût garantissant à notre économie un avantage concurrentiel.

Cette façon de tromper tout le monde de manière récurrent avec l’appui d’ « experts » qui vivent du marché et sous couvert de mécanismes inutilement complexe ne peut plus durer, non seulement au regard des enjeux sociaux et écologiques, mais également sur le plan démocratique.

Le retour à un opérateur public national intégré aux mécanismes d’échange transnationaux est possible. Le gouvernement ne peut se réfugier indéfiniment derrière un autre mensonge consistant à prétendre qu’une telle solution dégraderait, voire romprait les échanges transfrontaliers, allant jusqu’à agiter le spectre de la « France dans le noir », alors que la solution que nous défendons ne modifierait pas ces échanges !

17 novembre 2023

Contact pour préciser et détailler tous les éléments que nous avançons et répondre aux questions :

Anne Debrégeas – 06 83 55 10 47
Ingénieure économiste de l’Énergie (EDF)
Porte-parole du syndicat SUD-Énergie (et de nombreux spécialistes du sujet à EDF et RTE qui ne peuvent s’exprimer)